La Présidence du Conseil de l’UE : quelles perspectives pour la France et l’Europe

16 March 2022 /

5 min

Depuis le 1ER janvier 2022 et pour la première fois depuis 14 ans, la France a pris la Présidence du Conseil de l’Union Européenne. Mais concrètement, comment fonctionne cette présidence et quelle est son utilité ? On vous explique. 

Le Conseil de l’Union européenne, également appelé « Conseil des ministres de l’UE » ou encore le « Conseil », est une institution de l’Union Européenne comme l’est le Parlement européen ou la Commission européenne. Avec le Parlement européen, il détient un rôle de co-législateur de l’UE. Il est donc chargé de réviser et d’adopter les lois européennes. 

Quelles sont les prérogatives du Conseil de l’UE ?

Le Conseil traite des questions budgétaires. Il travaille avec le Parlement pour voter et réviser le budget européen. Avec le Parlement, il négocie et adopte également certains actes législatifs de l’UE,  sur proposition de la Commission européenne, conclut des accords internationaux et nomme les membres de certains organes tels que la Banque Centrale Européenne.

Le Conseil de l’Union européenne fonctionne avec une présidence tournante. Chaque Etat membre, à tour de rôle, exerce la fonction de président du Conseil pour un mandat de six mois. Depuis le 1er janvier jusqu’au 30 juin 2022, c’est la France qui préside le Conseil de l’Union européenne, pour la treizième fois depuis 1959. Le prochain pays mandataire sera la République Tchèque.

Attention, cette présidence du Conseil de l’UE ne signifie pas que le pays mandataire dirige l’Europe. En effet, depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne en 2009, les responsabilités de la présidence de l’UE ont été drastiquement réduites. A titre d’exemple, Emmanuel Macron, l’actuel président français, n’est pas président du Conseil européen qui réunit les 27 chefs d’État de l’UE. Ce rôle revient à une autre personne, qui n’est autre que Charles Michel, l’ancien Premier ministre belge élu à ce poste en 2019, pour un mandat de 30 mois renouvelable. Cette présidence de longue durée a été instaurée afin d’améliorer la continuité des travaux du Conseil. 

Quelle est la mission de la Présidence française du Conseil de l’UE ?

Lorsqu’un pays devient mandataire de la présidence, cela lui permet d’exercer davantage son influence en matière de politiques européennes. Le président du Conseil de l’Union européenne exerce quatre fonctions principales. Il est responsable de l’organisation des réunions ministérielles des 27 États membres et il guide les travaux législatifs du Conseil. Il est également responsable de la bonne coopération entre tous les États membres et représente le Conseil dans les programmes institutionnels.

Parallèlement, dans l’optique de renforcer la coopération entre Etats membres, un système de trio a été mis en place. La France n’est donc pas seule à la présidence de l’UE. Elle est secondée par la République Tchèque et la Suède, avec qui elle élabore un plan conjoint sur 18 mois. Ainsi, ses deux bras droits compléteront la présidence de la France en se basant sur un programme commun et des objectifs à long terme décidés ensemble. 

Quelles orientations pour la France ?

La France prévoit l’organisation de 400 événements durant sa présidence. Ils prendront la forme de rencontres politiques, de programmes culturels et d’événements civiques ouverts au plus grand nombre. Des sommets thématiques sont également prévus dans diverses villes françaises comme Strasbourg. 

Au niveau de son programme, en s’appuyant sur les sites du Conseil de l’UE et de la PFUE, on relève les points sur lesquels la France aimerait axer sa présidence. Le premier concerne la souveraineté de l’Europe. La PFUE souhaite une réforme de l’espace Schengen et la création d’un mécanisme de soutien intergouvernemental d’urgence. Ce dispositif permettra aux Etats de faire face aux crises qui pourraient survenir à leurs frontières et permettre à l’Europe une meilleure organisation en matière de gestion de l’immigration. Quant à la souveraineté, le président français veut un état des lieux des menaces afin d’optimiser la défense et la sécurité au niveau européen. L’Europe prévoit à cet effet la mise en œuvre d’un budget militaire commun. 

La France a également pour projet de mettre en avant « un nouveau modèle européen de production, de solidarité et de régulation » notamment avec la mise en place d’un salaire minimum européen. 

Enfin, elle souhaite œuvrer en matière de transitions numériques et climatiques pour permettre la relance de l’Europe, fortement impactée par la pandémie. 

L’élection présidentielle française de 2022 pourrait-elle compromettre la PFUE ? 

Comme précisé en amont dans l’article, la PFUE s’étend du 1er janvier au 30 juin 2022. Elle se superpose donc avec l’élection présidentielle française, organisée en avril 2022, et les élections législatives prévues en juin 2022.

La campagne présidentielle et la période de réserve électorale devraient ralentir la cadence de la PFUE, sur le plan politique notamment. Le Président sortant est en première place dans les sondages et semble bien positionné pour être réélu. Cependant, la vie politique française est remplie d’imprévus. Ainsi, personne ne peut complètement se positionner sur l’issue des élections.

De fait, il est compliqué d’imaginer ce qu’il se passera si Emmanuel Macron n’est pas réélu. Comme l’explique Christine Verger, vice-présidente de l’institut Jacques Delors, auprès de Franceinfo. « Il peut y avoir des transitions au plus haut niveau des institutions », « car ce sont des postes en partie politiques ». Mais au niveau de la direction politique en matière européenne, peu de changements sont à prévoir car « la majorité des personnes travaillant au sein du secrétariat général des affaires européennes, par exemple, n’ont pas de raison de bouger », car ce sont « des spécialistes des questions européennes ». 

Un tel scénario a déjà eu lieu dans le passé, en 1995, lorsque Jacques Chirac avait succédé à François Mitterrand à la présidence de la République et donc de la PFUE. Mais cela n’avait pas eu de grande incidence. Alain Juppé a été remplacé par Hervé de Charrette à la tête du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères français. Tous les deux issus de la droite, une continuité politique avait pu être assurée au sein du gouvernement. Si ce scénario venait à se reproduire aujourd’hui, et  à la vue des directions politiques en matière européenne des opposants à la majorité, on peut légitimement s’inquiéter sur la direction que pourrait prendre la PFUE ; et d’ailleurs plus généralement de la place de la France au sein de l’Union Européenne si un parti extrémiste arrivait au pouvoir.

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