La COP 27 : avancée timide, forte déception

15 December 2022 /

5 min

Le 6 novembre dernier a débuté en Egypte la 27ème Conférence des Parties (COP) sur le climat. Celle-ci s’est terminée le dimanche 20 novembre, deux jours après la date initialement prévue face à l’impossibilité d’aboutir à un accord dans les temps.

Un accord difficilement trouvé sur les pertes et dommages

Les discussions auront été houleuses et difficiles entre les parties prenantes de cette réunion internationale, pour finalement arriver à un accord. La question en jeu portait sur le dédommagement des pays les plus exposés aux conséquences du réchauffement climatique. Une question cruciale puisque ces pays sont à ce jour les plus exposés aux conséquences néfastes du changement climatique, alors même qu’ils y contribuent le moins (Afrique-subsaharienne, Asie du Sud-Est). La solution discutée lors de la conférence était un fonds de compensation des pertes et dommages subis par ces pays en développement. Ces pays ont obtenu gain de cause notamment au travers de négociations compliquées avec certains pays pétroliers (Arabie saoudite en tête), producteurs de ces mêmes énergies fossiles qui paradoxalement contribuent grandement au réchauffement de la planète.

Les négociations ont été âpres et de nombreuses tensions entre certains Etats se sont fait sentir. Dans sa déclaration du 19 novembre, le Vice-Président de la Commission européenne, Frans Timmermans,  a d’ailleurs reproché à certains Etats leur absence d’efforts dans le processus : « Souvenez-vous, nous étions là il y a quelques mois et personne ne voulait de cela sur l’agenda. Maintenant nous parlons de créer un fonds. Et cette impulsion est venue de nous. Et je pense que cela devrait être réciproque ». Au début défavorable à l’établissement d’un tel fond, l’Union Européenne a assoupli sa position et fait un pas vers le groupe de pays en développement qui s’était constitué pour porter plus avant ce projet. Frans Timmermans avait proposé le jeudi 17 novembre de créer un fonds de réparation à destination des pays les plus exposés aux conséquences du dérèglement climatique. Dans la proposition du Vice-Président, l’objectif d’un tel fonds serait de remédier aux dommages subis par ces mêmes pays. Cet assouplissement de la position européenne a été amorcé par l’extrême unité des pays en développement, qui a fait bloc lors de cette COP 27. Ce groupe était composé notamment de pays d’Afrique, d’Etats insulaires du Pacifique, mais aussi paradoxalement de la Chine (plus grande  émettrice de gaz à effet de serre) et des pétromonarchies du Golfe.

Ce n’est que le dimanche 20 novembre, deux jours après la fin initialement prévue de la COP 27, que les Etats sont parvenus à s’accorder sur la création du fonds. Il s’agit d’une petite avancée tout de même historique. En effet, les Etats-Unis et l’Union Européenne sont traditionnellement opposés à un tel fonds d’indemnisation pour les pays les plus vulnérables économiquement et exposés aux conséquences du changement climatique. Toutefois, les pays en développement concernés par le fond restent sceptiques. Ils craignent une nouvelle désillusion car des dispositifs similaires créés antérieurement sont toujours restés lettre morte ; en somme de beaux discours qui n’ont jamais été suivis d’effets. Ce fut par exemple le cas du Fonds vert pour le climat créé lors de la COP15 de 2009. Ce fonds devait aider les pays en voie de développement à lutter contre les effets du changement climatique, mais son objectif n’a jamais été rempli.

Quid de la question de la réduction des émissions ?

Cette COP 27 fut un « progrès politique, mais pas climatique » titrait le journal belge Le Soir à la sortie de celle-ci. En effet, aucun progrès n’a pu être observé en ce qui concerne la lutte à proprement parler contre le dérèglement climatique et ses causes. Cela est d’autant plus décevant que l’année 2022 a été profondément marquée par des événements climatiques extrêmes, canicules et températures anormalement élevées pour le mois d’octobre. Les victimes du réchauffement climatique sont toujours de plus en plus nombreuses, comme l’on a pu le voir cet été avec les inondations au Pakistan, ou avec la famine ayant cours en Somalie causée par la forte sécheresse qui décime la région.

Un groupe de 80 pays mené par l’Inde avait proposé d’inclure dans le texte final de l’accord de la COP 27 le principe d’abandon progressif de toutes les énergies fossiles. Malheureusement une telle ambition n’a pas pu voir le jour du fait notamment de la forte opposition de l’Arabie Saoudite et de la Chine. « Il est extrêmement frustrant de voir des mesures urgentes sur la sortie progressive des énergies fossiles bloquées par un certain nombre de grands émetteurs et de producteurs de pétrole » a déclaré Annalena Bareback, ministre des Affaires étrangères allemande.

Bien que l’Egypte ait rappelé l’engagement international de maintenir la hausse des températures en-deçà de 1,5°C d’ici à 2100, nombre de scientifiques estiment d’ores-et-déjà cet objectif irréalisable au regard du peu d’efforts actuellement mis en place. C’est notamment le cas du GIEC qui dans son rapport de 2021 avait enjoint les représentants politiques des Etats à agir au plus vite. L’urgence climatique est telle que seule une action d’ampleur et immédiate pourrait éventuellement avoir un impact conséquent et inverser la tendance désastreuse dans laquelle nous sommes engagés. 

Quel bilan pour la COP 27?

La COP 27 de Sharm-el-Sheikh restera dans les mémoires comme celle de l’instauration d’un mécanisme d’équité et de justice climatique. En effet, elle a permis la création d’un fonds de réparation à destination des pays les plus vulnérables afin de compenser les pertes et dommages subis du fait du dérèglement climatique. Toutefois, les aboutissants de ce dispositif doivent encore être construits, l’accord restant assez évasif notamment sur l’identification des pays récipiendaires de l’aide. Mais c’est indéniablement une immense déception qui a dominé cette convention, en ce que la question de la réduction des émissions de gaz à effet de serre a été complètement mise de côté malgré un rappel timide des engagements de l’accord de Paris. 

Dans un contexte international très tendu, il est indéniable que la COP 27 en Egypte n’a pas bénéficié d’une attention centrale ; bien au contraire. Par ailleurs, l’actuelle crise énergétique fait passer la question climatique au second plan pour plusieurs Etats. L’Allemagne par exemple a réouvert des centrales à charbon. D’autres Etats européens se tournent vers les pétromonarchies du Golfe, peu réputées pour leur respect de l’environnement comme des droits humains.

Bien que l’avenir semble plus que jamais incertain, le ballet des COP continuera, en s’arrêtant l’année prochaine à Dubaï, une ville pourtant peu connue pour ses engagements climatiques.

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